Des nouvelles de Delphine et
Marinette…
Ces deux fillettes, qui sont
en fait des jeunes filles, ne sont pas des héroïnes de papier mais des
citoyennes du monde comme vous et moi et pourraient tout aussi bien s’appeler
Zobeïde et Shéhérazade.
La date de l’ultimatum est
désormais caduque cependant l’intercession d’une femme, maître (peut-être devrais-je dire "maîtresse") du barreau, leur offre provisoirement grâce à un recours suspensif quelque
sursis pendant que de nombreuses personnes d’horizons divers se mobilisent autour
de la famille.
Dans un conte, le parcours est généralement
semé d’embûches mais les choses se terminent (presque) toujours bien pour les
héros auxquels nous nous identifions.
Dans la vraie vie, celle qui ne
nous propose plus de héros mais qui nous permet parfois de rencontrer des
personnes avec lesquelles nous entrons en empathie, nous constatons à la fois similitudes
et dissemblances par rapport à la fable. Dissemblances car les décors y sont
rarement ceux d’une ferme jurassienne ou ceux d’un palais persan et car les
personnages n’y font que peu souvent étalage de leurs pouvoirs magiques. Similitudes
car certains de ces mêmes personnages y possèdent une âme aussi noire que celle
du Loup ou du Roi des Rois sans toutefois être finalement châtiés pour
leur actes.
Dans un conte, qu'il soit traditionnellement imprimé sur vélin ou plus généralement de nos jours
diffusé sur écran plat, la distance est telle avec les personnages qu’elle nous
permet à tout moment de refermer le manuscrit ou d’éteindre la télévision pour
oublier presque instantanément les vicissitudes auxquelles ils sont soumis. La petite
fille aux allumettes cesse dès lors, comme l’homme qui passe ses nuits dehors
sur des cartons, d’avoir froid, celui qui se débat dans l’eau glacée de la mer
cesse de se noyer et ceux qui sont renvoyés vers la misère ou les dangers qu’ils
ont fui cessent d’avoir peur.
Dans la vraie vie, quand les
personnages passent de deux à trois dimensions, quand ils se dépixélisent pour
laisser place à des êtres de chair et de sang, il ne nous suffit pas de détourner
les yeux pour interrompre le cours de leur histoire. Un regard échangé de
pupilles à pupilles entremêle de manière irrévocable les destins de ceux qui se
rencontrent. Les uns, souffrant de leur condition, et les autres, luttant
contre la condition que l’on inflige aux uns, tissent des liens indéfectibles. Ce
qui unit ces uns et ces autres, ceux qui luttent et ceux qui souffrent, ceux
qui ont des droits et ceux qui n’en ont pas, c’est simplement le bien le plus
cher que nous ayons tous en commun, notre humanité.
Zobeïde, Shéhérazade et leurs parents tentent à présent, face au
cynisme de certaines des lois qui régissent notre société, de rassembler le
maximum de preuves de leur infortune et le maximum de témoignages attestant de
leur volonté de remplir les devoirs auxquels ils souhaitent ardemment être
soumis. Gageons qu’avant que mille et une nuits ne se soient écoulées ils échapperont
au couperet qui les menace.
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